Alors que la direction de la compagnie aérienne Air France rencontre aujourd’hui les syndicats représentatifs pour parler salaire, plusieurs de ces derniers parlent de honte et de trahison suite à la parution d’un article affirmant que la CFE-CGC s’oppose à toute augmentation.

La rencontre ce 17 octobre 2018 entre la nouvelle direction et les organisations représentatives risque d’être tendue, suite à l’article publié par Mediapart affirmant que la CFE-CGC « se bat contre l’augmentation des salaires » dans un courrier daté du 17 septembre. « Honteux » selon le SNPNC, « quelle honte » renchérit » FO, tandis que le SNPL Air France y va de son communiqué parlant de « trahison », accusant le syndicat d’avoir « pour de basses raisons politiques choisi de demander par courrier à M. Benjamin Smith de ne pas donner raison à l’intersyndicale par un quelconque geste. Jusqu’à ce jour, cela a été fait et nous en remercions monsieur Gateau. Si vous voulez garder des interlocuteurs forts, respectueux de l’entreprise et capables de faire avancer les accords d’entreprise, il ne peut en être autrement. S’il doit y avoir un geste salarial en fin d’année, il ne peut mettre en péril des syndicats responsables comme le nôtre… ». Un texte suivi selon le syndicat majoritaire chez les pilotes par « un odieux chantage » : « Dans le cas contraire, notre syndicat ne sera plus là pour vous accompagner ». Le SNPL est « stupéfait et choqué par cette trahison, cette ‘collaboration’. Susciter ou rentrer dans ce jeu ne peut que provoquer des conflits et surtout empêche l’établissement de relations sociales normales. Nous invitons la nouvelle direction de l’entreprise à cesser immédiatement ce genre de pratique ».

La CFE-CGC a elle aussi réagi à la publication de l’article, évoquant « des propos mensongers pour nuire aux négociations syndicales du 17 octobre » et se demandant pourquoi un courrier envoyé à Benjamin Smith après la rencontre du 17 septembre se retrouve publié à deux jours de la réouverture des négociations salariales. L’organisation a beau jeu de rappeler son calendrier, y compris la participation le 6 octobre à une réunion avec l’ensemble des organisations syndicales. Et un autre courrier à la direction d’Air France a d’ailleurs confirmé son « accord sur les propositions faites soit 2% au 1er janvier 2018, 2% au 1er janvier 2019 et une négociation en octobre 2019 avec des négociations catégorielles sur la partie des augmentations individuelles ».

Le syndicat a beau jeu de rappeler qu’il ne fait pas partie de l’intersyndicale, ayant signé au printemps aux côtés de la CFDT la proposition d’Air France d’une augmentation générale de 1% (ajustée à l’inflation 2018 prévue à 2,3% minimum, précisait-il le 1er octobre). Il rejette en effet « leurs revendications salariales, qui portent sur le court terme et qui mettraient en péril l’investissement dans le développement d’Air France et la pérennité de nos emplois ». Et rappelle que les 15 jours de grève menés au printemps ont fait perdre à la compagnie aérienne « beaucoup d’argent, 335 millions, et l’intéressement qui va avec en 2019 (2000 euros par personne) ».

La CFE-CGC croit aussi que cette « diversion » a quelque chose à voir avec son assignation en justice d’Air France sur le fait que les personnels au sol « ne sont pas associés aux négociations d’accords stratégiques de l’entreprise, négociés uniquement avec une catégorie de personnel ». Cette situation dure depuis des années, souligne le syndicat, mais alors que tout le monde la critique « aucune organisation syndicale n’a eu le courage de lancer une action juridique ». Peut-être parce que cette assignation « va bouleverser la gouvernance de notre entreprise, qui a toujours fonctionné sur les clivages des catégories de personnels.  À l’aube des élections professionnelles à venir, ne soyons pas dupes de l’instrumentalisation d’informations non vérifiées et de la violence des propos de certaines organisations syndicales. Cette diversion chercherait-elle à détourner l’attention des salariés et à masquer l’échec de l’intersyndicale d’obtenir 5.1% en 2018 ? ».

En attendant, Ben Smith est de nouveau allé à la rencontre des employés d’Air France hier, à l’aéroport de Paris-CDG ; il devrait selon Les Echos assister ce mercredi au Conseil du SNPL « qui portera notamment sur les négociations en cours ». Rappelons que l’intersyndicale (qui a « perdu » le SPAF durant l’été) réclame une augmentation générale des salaires de 5,1% (plus 4,7% supplémentaires pour les pilotes), avec +3,8% au 1er avril (rattrapage d’inflation 2012-2017) et +1,3% en octobre (inflation prévisionnelle de 2018). Ces revendications auraient été abaissées durant les négociations avant le CCE du 14 juin dernier, à une hausse des grilles de salaires de 4% en 2018 et du montant du niveau de l’inflation en 2019 (hors avancement automatique), mais l’intersyndicale a choisi de débuter les nouvelles négociations.sur la base haute.