Culture oléagineuse cousine du lin, la cameline est jusqu’à présent implantée au nord du Bassin parisien, essentiellement en bio. Elle pourrait désormais intégrer l’assolement des agriculteurs conventionnels, en intercultures.  « Cultivée en dérobé, la cameline n'entre pas dans le cadre des 7 % maximum de biocarburants autorisés pour les transports routiers mais elle est éligible à ceux prévus pour l'aviation, explique Guillaume de la Forest, chargé de mission agronomie à Saipol. Dans ce cas, elle n’entre pas en compétition avec les cultures alimentaires, c’est là son intérêt ». Le spécialiste français de la transformation des graines oléagineux voit dans cette culture, qui se sème en intercultures après des pois ou une orge par exemple, une source de revenu complémentaire pour les agriculteurs. 

La culture est testée depuis trois ans par plusieurs organismes-stockeurs dont Valfrance et Agora en Picardie. Fort de cette première phase expérimentale, Saipol et Terres Inovia ont décidé de lancer à partir de cet été, une filière cameline-biocarburants, sous forme pilote. « Si les résultats sont concluants, nous la déploierons à plus grande échelle en 2023, indique le chargé de mission. Le rendement obtenu jusqu’à présent est en moyenne de 8 à 10 q/ha, mais peut aller de 0 à 17 q/ha ».

Un cycle de 100 jours

« L’enjeu dans la zone Nord est de retenir une variété précoce qui fait son cycle en 100 jours, souligne Guillaume de la Forest. C’est le cas de la variété Vera, du sélectionneur espagnol Camelina Company. L’objectif est de la semer juste après la récolte des pois protéagineux ou de conserve ou de l’orge d’hiver par exemple, et de la récolter avant le 15 octobre. L’idéal est qu’elle soit moisonnée sèche, à 9 % d’humidité, pour ne pas nécessiter de séchage ». D’après Terres Inovia, la cameline semble peu sensible aux températures élevées, ne dépassant pas 35°C, mais il est préférable de la semer avant un épisode pluvieux, pour garantir une levée rapide et homogène. Elle peut être semée après un déchaumage superficiel ou en semis direct, à raison de 8 kg/ha de semences, avec un semoir à céréales, 10 à 12 kg/ha pour un semis à la volée. « Après une légumineuse, un pois ou une lentille, par exemple, il n’est pas nécessaire d’apporter d’azote, précise Nicolas Latraye de Terres Inovia. Par contre après une céréale, il est indispensable de lui apporter 40 unités d’azote pour réussir la culture. »

La cameline est aussi peu sensible aux bioagresseurs. « C’est une plante résistante aux maladies et que les altises n’aiment pas, souligne Patrick Devaux, responsable de la station expérimentale d’Estrées-Mons chez Terres Inovia. Si la levée est rapide, la culture étouffe les adventices, et n’a pas besoin d’être désherbée ». Autre avantage de la cameline semée en intercultures, elle fournit des fleurs riches en nectar et en pollen pour les abeilles à une époque où la production des autres plantes décline.